Sacha et Môa 
Pour qui connaît Edouard Exerjean ou au moins a vu un de ses spectacles, il paraît inévitable qu’il devait se confronter un jour à Sacha Guitry. Pas seulement parce qu’ils utilisent l’un comme l’autre une langue française riche, nuancée et châtiée, parce qu’ils font preuve à tout moment de vivacité d’esprit, d’humour et d’une aptitude à la repartie à la fois drôle, tendre et vache, parce qu’ils sont curieux des oeuvres de la littérature, du théâtre, de la musique ou du cinéma avec le plus grand éclectisme en même temps que la plus grande exigence, ou simplement parce que pour l’un comme pour l’autre « ce qui ne passionne pas ennuie ».
Au-delà de tout ce qui précède, ils devaient aussi se rencontrer parce que l’oeuvre de Guitry dissimule sous une couverture de paillettes des trésors qu’un explorateur comme Exerjean devait découvrir et mettre en évidence.
Ce qu’il a entrepris il y a quelques années avec Jean Cocteau (« Du visible à l’invisible ») se poursuit donc avec Sacha Guitry. D’ailleurs, même si leurs styles sont totalement différents, Cocteau et Guitry ont bien des points communs. Leur vie mondaine, accompagnée de nombreux bons mots que chacun aime à répéter, a trompé les observateurs superficiels qui n’ont pas su apercevoir au-delà de cette apparence une réflexion et une profondeur qui ne souhaitent pas se mettre en avant. « Mémoires d’un Tricheur », bien sûr, son unique roman, mais aussi ses souvenirs du temps de l’occupation allemande, ou un film documentaire peu connu, « Ceux de chez nous », permettent de traverser le miroir et d’apercevoir un homme sensible, généreux et finalement si peu ostentatoire. Comme Cocteau témoignant pour sauver Jean Genet, Guitry se met aussi en péril en intervenant pour éviter la déportation à Tristan Bernard.
Ce spectacle permettra de retrouver tout Guitry, aussi bien celui que tout le monde connaît, brillant, pétillant, amusant et acerbe, mais aussi celui plus secret, profond, sincère et tendre qu’on a tendance à méconnaître.
Et, bien sûr, soutenant ces textes, Edouard Exerjean jouera au piano les musiciens qui accompagnèrent Guitry, ou qu’il a aimé et dont il a parlé avec tant de talent.
Témoignage :
Quel beau spectacle ! Très différent de ce à quoi je m’attendais : mes parents allaient souvent au théâtre, et ils m’y emmenaient : j’avais encore en tête les pièces pétillantes d’humour vachard et misogyne que j’avais connues dans ma jeunesse.
Son passage en prison ne m’avait alors pas beaucoup marqué.
Exerjean est remarquable, tant comme acteur que comme pianiste. Quel virtuose !
Un remarquable spectacle : intelligent et charmeur. Épatant !
Gilles Schaufelberger (13 mai 2012)
PROGRAMME
CRITIQUES
textes (dont l’un est d’une actualité aussi drôle que brûlante), joués avec conviction et grande efficacité par Exerjean, s’intercalent des pages de piano : de Debussy, une valse primesautière de Reynaldo Hahn, une tendre barcarolle de Tchaïkovski, Ibert et Mozart. Sans oublier une mélodie drolatique de Messager où notre pianiste montre qu’il peut aussi être chanteur. Et si la Scala n’est pas pour demain, il joue à loisir de ses imperfections, qui ajoutent au comique de l’histoire..