A la ville, l’homme est un grand parleur. Rien dans les mains – qu’il a volantes -, tout dans le regard de noir velours, il vous charme d’une conversation de grand style, nourrie de références aux poètes, musiciens, gens de théâtre qu’il fréquente depuis toujours. C’est un comédien-né qui s’exprime devant nous. Une nature. Un tempérament. Fusent alors les rires, libérateurs et fraternels. L’homme est un grand rieur.
A la scène, le pianiste nous ravit. Il se manifeste en musique de chambre – duos, trios, quatuors instrumentaux – dans ses grands classiques favoris : Mozart, Beethoven Schubert, Chopin… Et, comme il adore la voix humaine, il se fait une fête de sa complicité avec des chanteurs, dans des programmes éclectiques de lieder ou de mélodies. Voilà un homme de partage, de connivence, de convivialité. Il n’en excelle pas moins seul au clavier, en récital ou avec orchestre, dans la musique française -Poulenc, Satie, Debussy, Honegger, Milhaud, Saint-Saëns, Tailleferre… – comme dans toutes les musiques de caractère (ah ! l’Espagne !), qu’il sert avec une jubilation qui n’appartient qu’à lui.
Et puis, parce qu’il est riche d’un passé multiple – une maîtrise de Lettres à Aix-en-Provence et des lauriers au Concours international de Naples ; une carrière de chroniqueur musical dans d’éminentes publications, une autre de pianiste-conférencier aux Jeunesses Musicales -, parce que, comme le fut son maître et ami Pierre Barbizet, il est tenaillé d’innombrables passions esthétiques, voici qu’il confond tous ses talents en se mettant au « one man show ». Parfaitement ! Voici qu’il nous propose des « Partitions littéraires » et autres « Portraits de cœur », spectacles inédits faits de pièces et de morceaux, entendez de morceaux choisis, de ses musiciens favoris et de pages empruntées à ses écrivains et poètes de prédilection, de Jean Cocteau à Sacha Guitry, de Balzac à Anna de Noailles, en passant par Anouilh, La Fontaine, Süskind, Obaldia, Rilke, Prévert, Hugo, etc. Un véritable festival d’humour et de tendresse, en paroles et en musique. Le bonheur !
Que l’homme soit enfin professeur, vous ne vous en étonnerez point ! Pas plus que d’apprendre l’engouement de ses élèves tel que le film de Marie-Claude Treilhou l’a superbement capté dans ses classes de Conservatoire à Paris et à Marseille. Car notre artiste polymorphe est également à l’aise dans cet emploi magistral où la fantaisie le dispute sans cesse au sérieux, le théâtre à la musique, là aussi ! Parlez-en à « ses » enfants ! Ils aiment tous Edouard Exerjean, parbleu !
Et moi donc !
Jacques Bonnadier
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